[Terminé] Heureuse de te retrouver ⚝ Jemima

16 Janvier 2020

Amaya était rentrée à San Francisco depuis quinze jours maintenant. De la famille Donavan, elle n’avait pour l’instant revu que Judith, qui l’accueillait chez elle depuis son retour. Elle n’avait pas retrouvé son amie avec qui elle était très proche autrefois, Jemima. Pourtant, Judith lui avait dit qu’Amaya n’allait pas pouvoir se cacher indéfiniment, quand quelqu’un venait chez elle, Amaya se cachait dans la chambre et elle évitait au maximum de sortir en dehors de la maison. Et puis, son amie lui manquait, revenir ici lui rappelait encore plus leur lien d’autrefois et elle avait hâte de la retrouver, plus hâte que de retrouver sa famille en tous cas. Jemima n’allait pas la juger, elle ne l’avait jamais jugé peu importait les choix, les actions d’Amaya. Alors dans un élan de courage Ama s’était préparée, elle avait eu envie de retrouver son amie de toujours et elle s’était dit qu’elle devait le faire sur-le-champs, avant que son envie ne disparaisse pour de nouveau laisser place à la peur.

C’est au commissariat qu’Amaya s’était rendue, espérant y retrouver Jem’, elle ne savait pas si elle y travaillait encore, elle ne connaissait pas son emploi du temps, mais sur un coup de chance, elle serait peut-être là. Et puis dans le cas contraire, elle se dirait que c’était le destin, qu’elle ne devait pas la revoir, que c’était peut-être encore trop tôt. Ama était devant le commissariat, elle commençait à hésiter, retrouver Jemima n’était peut-être pas une bonne idée. Amaya ne lui avait donné aucune nouvelle depuis deux ans, la seule fois ou elle avait pris contact avec elle, c’était pour lui dire que la vie à San Francisco était trop difficile et qu’elle avait besoin de s’éloigner, elle s’excusait de disparaître et remerciait son amie pour tout ce qu’elle avait fait pour elle depuis toujours avant de lui souhaiter d’être heureuse. Ce message datait de deux semaines après le départ d’Amaya, elle n’avait jamais redonné de nouvelles après cela. Jem l’avait peut-être oublié, elle était peut-être passée à autre chose. La brune devait ôter ses pensées de son esprit et devait entrer. Une fois à l’intérieur, elle s’était adressée à une personne à l’accueil. « Bonjour, je chercher l’inspectrice Jemima Rojas. » Sans demander pourquoi la personne avait désigné une femme de dos, pas très loin d’eux, en détournant le regard, il s’agissait bien de Jemima, il n’y avait plus qu’à avancer pour la rejoindre. « Jem. » La voix tremblante Amaya avait été incapable d’en dire plus, elle n’avait plus qu’à attendre qu’elle se retourne et plus qu’à attendre de voir sa réaction.

Amaya avait pris une décision importante, elle avait décidé de retrouver son amie, la petite sœur de Judith, elle avait grandi avec elle, elles s’étaient toujours très bien entendues… Elle avait énormément manqué à Ama pendant ces deux années, mais elle n’avait pas eu d’autre choix que d’essayer de l’oublier, comme elle avait essayé d’oublier tout le monde, sa famille, ses amis, tout le monde, sans exception. Si avant de partir de chez Judith, elle était déterminée à retrouver son amie, plus elle s’approchait du lieu de travail de Jem, plus elle avait envie de faire demi-tour. Elle était comme cela et on ne pouvait pas lui reprocher, elle était mal au plus profond-elle, elle s’imaginait que tout le monde lui en voulait pour la magie noire, pour son départ, elle avait été lâche et faible, elle en avait conscience et pour elle personne ne pouvait lui pardonner, même si Judith lui avait déjà prouvait le contraire. Elle s’imaginait que tout le monde était tellement mieux sans elle, qu’ils préféraient tous la savoir loin d’eux, ne plus avoir de nouvelles était sans doute mieux pour eux. Amaya était détruite, depuis la mort de sa jumelle, elle s’était comme éteinte, elle ne pensait que de façon négative, elle ne souriait presque plus, elle se dénigrait souvent… Elle avait perdu une partie d’elle quand Anaya était morte, sans oublier qu’Amaya avait été plongée dans le coma suite à cet accident, qu’elle aussi avait faillit perdre la vie et qu’elle aurait sans doute préférait cette option, qu’elle avait eu besoin de rééducation, qu’elle était restée à l’hôpital un long moment et à peine sortie de l’hôpital, elle s’était lancée dans la magie noire espérant ramener sa sœur à la vie, puis avait fuit la ville et ses proches presque aussitôt, elle n’avait jamais vraiment essayé de s’en remettre, elle n’en avait jamais vraiment eu l’occasion.

En entrant dans le commissariat Amaya s’était adressée à la personne qui se trouvée à l’accueil pour demander après l’inspectrice Rojas. La personne lui indiquait une personne un peu plus loin, une tête blonde, de dos, il n’y avait pas de doute, il s’agissait de Jemima. Ama s’était approchée d’elle, non rassurée, elle avait prononcé son nom attendant sa réaction. Et quand elle s’était retournée, qu’elle avait prononcé son prénom avant de s’avancer le sourire aux lèvres pour la prendre sans ses bras, Amaya n’avait pu qu’être soulagée. Alors tout le monde ne lui en voulait pas. Ama avait attendu quelques secondes avant de serrer ses bras autour de son amie, retenant ses larmes, elle était heureuse et soulagée de retrouver son amie, mais elle n’avait pas envie de pleurer. « D’accord. » Amaya ne parlait pas fort, elle se sentait un peu gênée par la situation, elle ne savait pas comment réagir, quoi dire, quoi faire face à Jemima. Elle suivait son amie jusqu’à une machine à café, où les deux jeunes femmes avaient pu se servir avant de sortir, sans doute pour être loin des oreilles et des regards, pour être plus tranquille, comme l’avait dit Jem un peu plus tôt. Amaya avait le regard plongé dans son café, elle devait des excuses à son amie, mais elle n’avait pas la force de la regarder pour le faire. « Je… Je suis sincèrement désolée Jem. Désolée d’être partie, désolée de ne jamais avoir donné de nouvelles, désolée de tous vous avoir abandonné. Et j’espère sincèrement que tu pourras me pardonner un jour. » Amaya était persuadée que même si elle ne lui montrait pas Jemima ressentait tout de même de la colère, aussi infime soit-elle, même une colère enfouie, cachée. Elle voulait s’excuser et elle devait le faire de toutes façons, elle voulait aussi le pardon de tous ceux qu’elle avait fait souffrir.

Amaya se contentait d’un sourire. Elle n’avait pas besoin de s’excuser avec Jemima, pourtant, elle en ressentait le besoin. Elle ressentait l’envie de s’excuser et l’envie de savoir qu’elle était pardonnée, même si au fond-elle rien de tout cela n’était vrai. Pour elle, tous lui en voulaient, mais tout le monde n’osait ou n’oserait lui avouer, bien trop lâche pour avouer la vérité, peut-être blessante, à une personne qui allait mal. Même si elle voulait croire Jem, elle se disait au fond-elle qu’elle n’en avait pas le droit, elle n’avait pas le droit de se sentir bien, de se sentir rassurée ou de ressentir tout autre sentiment positif. Amaya avait des raisons, elle avait même de très bonnes raisons d’être partie, elle aurait très bien pu ne jamais revenir et là aussi elle aurait eu raison. « Oui, j’avais besoin de repartir pour panser mes blessures. » Ces mots sonnaient faux, ses blessures étaient toujours bien présentes, encore plus depuis son retour à San Francisco. Revoir tout ce qu’elle avait connu autrefois, tout ce qu’elle avait quittait, tout ce qui lui faisait penser à la mort de sa jumelle, tout ça était une véritable torture mentale pour elle, mais elle ne savait pas à qui se confier, elle ne voulait même pas le faire de toute façon. Ama voulait garder cette souffrance pour elle. Elle était détruite et il n’y avait plus rien à espérer pour elle, c’était du moins ce qu’elle espérait. « Je ne veux pas que tu te fasses de faux espoirs Jem. Pour être honnête, je… Je ne sais pas si je vais rester ici. Je ne sais pas si j’aurais la force de rester ici pour de bon. » Et une fois de plus, elle partirait sans prévenir, elle quitterait la ville pour retrouver Londres ou une autre ville, mais cette fois-ci sans jamais se retourner et pour de vrai. L’absence de sa famille, de ses amis avait été très douloureuse, mais les retrouver était étrangement aussi douloureux. Alors que faire ? « Je peux me confier un peu ? » Amaya n’avait pas fait cela depuis très longtemps, mais elle en ressentait étrangement le besoin. Elle avait besoin de dire ce qu’elle avait sur le cœur et Jem était sans doute la bonne personne pour l’écouter. « Quand je suis partie à Londres, je voulais tous vous oublier, toi, ta famille, ma famille, ma défunte jumelle. Je pensais qu’être loin d’ici, loin de vous, allait me faire du bien. Je pensais pouvoir faire un trait sur mon passé, sur mon histoire, sur mes pouvoirs. J’ai eu peur de sombrer encore plus alors j’ai arrêté d’utiliser la magie pendant deux longues années. J’ai arrêté de vous donner des nouvelles parce que j’avais peur de ne pas supporter l’éloignement et de faire demi-tour pour rentrer ici, j’avais aussi peur de voir que vous vous fichiez bien de mon départ et que vivre sans moi ne vous faisait rien. J’ai été égoïste pour une fois et je n’ai pensé qu’à moi. Mais la vérité, c’est que ce départ à été très douloureux pour moi. Et le retour ici est encore pire. Depuis que je suis rentrée, je ne fais que des cauchemars, l’envie d’utiliser la magie est de plus en plus présente et j’ai peur de faire des bêtises, j’ai peur de ne pas réussir à me contrôler et de faire une nouvelle fois les mauvais choix concernant la magie. Être ici me fait souffrir. Je n’ai pas encore pu retrouver ma famille, je vis cachée chez Judith depuis deux semaines, par crainte de les retrouver. Et je pense sincèrement à repartir une fois de plus. Je sais que tu ne pourras rien y faire et je suis désolée de te confier ce genre de chose, mais j’avais besoin de me confier. » Il y avait bien longtemps qu’Amaya n’avait pas parlé autant, bien longtemps qu’elle n’avait pas exprimer son mal-être. Pourtant, à peine sa dernière phrase prononçait, elle avait regretté, elle n’aurait jamais dû se confier, elle aurait dû tout garder au fond-elle. Elle espérait maintenant que Jem n’allait pas la juger, qu’elle n’allait pas lui tourner le dos, parce qu’elle ne le supporterait pas. Ama retenait les larmes qu’elle avait tant de mal à dissimuler quand elle était seule ces deux dernières années, mais elle voulait se montrer forte alors qu’elle était détruite, pourtant, elle voulait faire croire que tout allait mieux pour elle. Avec ce qu’elle venait de confier à Jem, elle allait devoir ruser pour lui faire croire qu’elle allait mieux désormais.

Amaya avait besoin de se confier et personne n’était mieux placé que Jemima pour l’écouter et la conseiller. Ama le savait, elle avait toujours été là pour ça, elle savait que normalement rien n’avait changé de ce côté-là. Alors après les quelques mots de la blonde, Ama s’était confié, elle avait vidé son sac, dit ce qu’elle avait sur le cœur depuis trop longtemps. Elle savait qu’elle était peut-être en train de trop se dévoiler, elle allait sûrement regretter d’avoir trop parlé, mais après tout, ce n’était rien. Jemima était bienveillante comme toujours. Elle montrait qu’elle comprenait Amaya, qu’elle comprenait ce qu’elle ressentait, même si elle ne pouvait pas totalement imaginer ce qu’elle ressentait. Il était vrai qu’Amaya n’avait pas fait que perdre sa sœur, elle avait perdu sa moitié, celle avec qui elle partageait tout et tout le temps. Elle était partie brutalement du jour au lendemain et malgré le temps passé la douleur était toujours très intense. Elle se demandait toujours comment survivre à la perte d’un être cher. Sans aucun doute, Amaya aurait très mal vécu la perte de son autre sœur ou encore de ses frères, mais elle l’aurait vécu très différemment, c’était certain. Parce qu’avec eux, elle n’avait pas ce lien, cette connexion qu’elle partageait avec sa sœur jumelle.

« Merci. J’ai l’impression que tu es la seule à me comprendre. Et saches que tu me manqueras terriblement aussi, comme tu m’as manqué pendant ces deux dernières années. »

Il y avait également Judith, mais c’était assez différent. Judith ne l’encourageait pas à repartir si ça lui semblait être la bonne option. Elle voulait bien faire, Amaya n’en doutait pas, mais avec Jem, c’était différent. Amaya s’en voulait un peu moins de penser à repartir d’ici, pour son bien à elle. Elle avait le droit de penser à elle, il n’y avait rien de mal à cela, si elle avait besoin de partir, elle pouvait le faire. La blonde avait ajouté qu’Ama allait lui manqué, mais elle ne la décourageait pas à partir. Jemima avait aussi beaucoup manqué à Amaya, elle allait sans doute encore lui manquer si elle devait repartir. Et cette fois-ci, si Ama quittait la ville, ce n’était pas pour revenir ou revoir ses proches un jour ou l’autre, ce serait réellement pour tirer un trait sur son passé.

« Tu as sans doute raison. Mais je dois bien avouer que j’ai peur d’affronter les choses en face. Tu connais mes parents, ils vont terriblement m’en vouloir de les avoir abandonnés pendant deux ans, sans jamais leur donner de nouvelles alors qu’ils venaient de perdre une fille. Shea ne me pardonnera jamais d’être partie elle non plus. Elle m’en voulait déjà quand je suis partie pour tout le mal que j’ai fait à notre famille. Et mes frères, je sais qu’ils m’en voudront tout autant. J’ai peur de les affronter et honnêtement, je ne sais pas si c’est une bonne idée. Je ne sais pas si aller les voir ne leur ferait pas plus de mal. »

Si Amaya avait des choses à régler ici, c’était principalement des choses à régler avec sa famille, ses proches. Elle avait beaucoup de mal avant son départ, et puis tous les jours qui avaient suivis. Elle aurait aimé que tous lui pardonnent ses actes, mais elle n’avait pas le droit d’espérer, parce qu’elle savait que rien n’arriverait.

« Ma décision n’est pas encore prise. Rien n’est simple dans ma tête ces derniers temps. Je me bats avec moi-même. Il existe deux Amaya, celle qui veut être raisonnable et affronter les choses en restant ici et celle qui n’a pas envie de rester, celle qui veut fuir une nouvelle fois sans essayer. »

Elle ne savait pas laquelle des deux allait gagner, mais elle savait que rien n’allait être simple. Si elle décidait de rester, ça ne voulait pas dire qu’elle allait redevenir la parfaite petite Amaya du passé. Elle était détruite, elle voulait se reconstruire, avec ou sans l’aide de ses proches, mais sans eux, elle ne savait pas comment elle allait terminer. Rester ou partir ? Avec ou sans sa famille et ses proches ? Voilà les grandes questions qui hantaient Amaya depuis son retour.

« Je suis égoïste, je ne parle que de moi depuis tout à l’heure. Raconte-moi un peu ce que tu as fait tout ce temps, quand je n’étais pas là, il faut qu’on rattrape le temps perdu. »

Amaya souriait à son amie. Elle n’avait pas pour habitude de parler d’elle, mais il était vrai que depuis le début de la conversation n’était centrée que sur sa personne et elle avait réellement envie d’apprendre ce que son amie avait fait depuis deux longues années.

Jemima avait sans doute raison. Les Cooper n’allaient sans doute jamais comprendre les raisons de son départ. Ils avaient tous dû vivre une douloureuse épreuve en perdant Anaya, mais l’épreuve avait été plus douloureuse encore pour Amaya. Seules les sœurs Donovan semblaient avoir compris l’immense vide qu’avait laissé Ana en partant. Le jour de cet accident, Amaya n’avait pas uniquement perdu sa sœur, elle avait perdu une partie d’elle. Alors oui, elle avait ressenti ce besoin de partir loin de ses proches, de ses habitudes, parce qu’elle avait vécu les choses différemment. Elle avait elle aussi vécu cet accident, elle était restée dans le coma, n’ayant pas pu assister à l’enterrement de sa propre jumelle, elle n’avait pas réellement eu l’occasion de lui faire ses adieux et n’avait pas eu grand soutient à sa sortie d’hôpital. Peut-être aurait-elle évité de faire toutes ses erreurs si sa famille avait réellement était là pour elle. Amaya écoutait son amie parler, se contentant de hocher la tête, tout ce que Jem disait été vrai et Ama ne savait pas quoi ajouter de plus. Jemima lui avait ensuite conseillé de parler à sa famille, de leur dire tout ce qu’elle avait sur le cœur, elle s’était même proposée pour l’accompagner si elle en avait besoin. « Je te remercie, si je n’ai pas la force de le faire seule, je viendrais de demander de l’aide, mais je pense que je dois essayer de les affronter seule. » Amaya souriait à son amie comme pour appuyer ses remerciements. La brune avait décliné l’offre de Judith quand elle lui avait proposé de l’accompagner voir sa famille. Ce n’était pas qu’elle n’avait pas envie de leur aide, c’était simplement qu’elle avait peur de ne plus pouvoir les affronter seule par la suite. Et puis la famille Cooper n’allait pas accueillir Amaya de la même manière en présence de Jem ou Judith. Alors autant affronter leur vrai visage au plus vite.

Amaya avait besoin de se confier, elle n’avait pas réellement eu l’occasion de le faire pendant deux longues années. Quand elle était à Londres, elle s’était renfermée sur elle-même, elle travaillait et ses contacts s’arrêtaient là. Elle ne s’était fait aucun ami, simplement parce qu’elle n’en avait pas envie, elle refusait le contact humain. Bien évidemment, elle avait parfois essayait de s’entourer de nouvelles personnes, elle avait essayé d’oublier, mais elle n’y était jamais arrivée. Elle avait tout garder pour elle pendant deux ans. Une très longue période où elle avait eu le temps d’apprendre à se détester et à s’en vouloir pour tout. Pour la mort de sa jumelle, après tout, elle avait survécu à cet accident alors qu’il avait été fatal pour sa jumelle. Elle s’en voulait également pour l’abandon de sa famille. Pour l’utilisation de la magie noire. Pour toutes ses erreurs. La distance n’avait jamais réussi à la soigner, elle n’avait fait que camoufler les douleurs pour revenir plus puissantes à son retour. « J’en suis incapable. » Devenir une autre Amaya, juste pour un temps, le temps de guérir. C’était pour elle impossible. Comment guérir d’une telle douleur ? Comment se mettre en pause pour devenir quelqu’un d’autre. Elle avait bien des solutions, mais ce n’étaient sans doute pas les bonnes. L’utilisation de la magie pour oublier sa peine, pour effacer les souvenirs de sa jumelle. Où celle de devenir quelqu’un d’autre, mais pour toujours, sans retour en arrière possible. Elle pouvait bien redevenir la Amaya du passé, celle qui pendant quelques semaines étaient très différentes, parce que même si c’était la peine qui l’avait poussé à changer, elle arrivait à mieux vivre avec la douleur quand elle avait tourné le dos à la magie blanche, tourné le dos à tout ce qui était bénéfique dans ce monde. Le problème étant qu’elle refusait de redevenir cette Amaya.

Il était temps de changer de sujet. Amaya avait besoin de se confier, mais elle n’aimait pas cela. Elle n’aimait pas montrer ses faiblesses, même si elles étaient visibles aux yeux de tous. Parler de Jemima, de tout ce qu’Ama avait raté dans sa vie depuis deux ans était sans doute plus agréable comme conversation. Amaya avait toujours connu Jem et ne pas savoir ce qu’avait été sa vie pendant ces deux dernières années était très frustrant. « Toi aussi tu m’as beaucoup manqué. Et je suis contente de voir que malgré le temps passé, tu es restée la même. Même si avec ta famille rien n’est simple, tu restes forte, je t’envie. » Amaya n’avait pas la force d’affronter sa famille, de la défier, alors que Jemima le faisait depuis très longtemps. Sa famille avait du mal à accepter les choix qu’elle avait fait dans la vie. Comme quoi leurs familles n’étaient pas si différentes, elles avaient toujours des choses à reprocher. Ce n’était pas pour les mêmes raisons certes, mais dans le fond, ça ne changeait pas grand-chose. Il était compliqué de se battre pour des choses qui n’allaient sans doute jamais changer. En tout cas, retrouver une Jemima identique à celle de deux ans dans le passé était agréable. Amaya n’avait pas tant raté de la vie de son amie et elle savait qu’elle était toujours la même, c’est-à-dire qu’elle était toujours là pour elle, pour l’écouter, la rassurer, la conseiller, comme elle l’avait toujours fait.

« Merci d’être là. » Jemima avait toujours été là pour Amaya. Elles se connaissaient depuis toujours et Amaya avait toujours pu compter sur Jemima. Même si depuis la perte de sa jumelle, elle avait refusé l’aide de ses proches, même si elle s’était sentie seule pendant deux longues années, elle savait qu’elle pouvait compter sur la famille Donovan, elle était comme une seconde famille pour Amaya.

Il était tant de changer de sujet. Amaya ne voulait pas continuer la discussion qui la concernait. Il était difficile de trouver un sujet de conversation alors que les deux femmes ne s’étaient pas parlé pendant deux ans. Pourtant, elles n’allaient pas se regarder dans le blanc des yeux sans dire un seul mot. Le seul sujet de conversation qui lui venait à l’esprit, c’était bien évidemment Jemima, tout ce qu’elle avait vécu pendant ses deux ans d’absences. Amaya haussait les épaules, est-ce que la vie de Jemima était enviable ? Sans doute plus que celle d’Ama. Bien évidemment Jem avait connu des difficultés, sa famille avait eu beaucoup de mal à accepté son choix de métier et son mari, mais elle avait toujours su se montrer forte, elle avait su leur tenir tête. Amaya était désormais incapable de se montrer forte, elle faisait juste en sorte de ne pas sombrer, mais ça n’allait pas plus loin, plus maintenant. « Pauvre Judith. » Amaya s’efforçait à sourire. Même si elle ne le disait pas clairement, elle était contente de savoir que Jemima avait quelqu’un sur qui s’appuyer, se reposer. Judith avait toujours été là pour elle, et elle continuait à le faire. Sur qui pouvait compter Amaya dans sa famille ? L’aîné de la famille sans doute, mais il lui en voulait certainement pour ce qu’elle avait fait. Amaya savait qu’elle ne pouvait pas compter sur sa grande sœur, elle l’avait abandonné depuis longtemps, alors qu’elle était au plus mal elle s’en était déjà éloignée, laissant sa petite sœur sombrer un peu plus chaque jour. Que dire de son second frère, un lâche qui l’avait abandonné quand Amaya avait le plus besoin de lui, allant tout raconter à leur famille, forçant Amaya à prendre le large ne supportant plus la pression. « Et tu as tout à fait raison, chacun à le droit d’être la personne qu’il veut. Tu respectes la personne que tu es réellement et c’est génial. » Tout le monde n’en était pas capable, Jemima avait une certaine force, elle ne s’en rendait peut-être pas compte, mais c’était pourtant le cas. Elle avait eu la force de défier sa famille pour être la femme qu’elle voulait être. « Je ne dirais pas le contraire, tu es têtue Jemima, tu l’as toujours été. Mais tu es forte, contrairement à ce que tu crois. Je pense qu’il faut une certaine force pour oser défier sa famille, pour faire en sorte que ce que l’on souhaite arrive. Tout le monde n’est pas capable de dire non à sa famille, à ses proches… » Oui Jemima était têtue, elle était aussi un peu rebelle, c’était sans doute ce qui lui avait donné la force de défier les siens. Elle avait toujours été comme cela, depuis très jeune déjà, Amaya s’en souvenait parfaitement bien. Jemima était la rebelle de sa famille, aujourd’hui encore. « Et côté travail ? Raconte-moi tout. » Amaya pouvait écouter tout et n’importe quoi, elle avait simplement envie d’entendre Jem parler, d’entendre tout ce qu’elle avait pu louper pendant deux ans, en connaissant le plus de choses possibles, c’était comme si elle n’avait abandonné personne. « Oh, mais je te dérange peut-être, tu es en train de travailler et moi, je t'accapare. » Amaya était contente de retrouver son amie, elle en avait même oublié qu'elle était sur son lieu de travail et qu'elle avait peut-être des choses à faire. Si Jemima pouvait et voulait encore parler, ce serait avec joie, mais si elle devait retourner à son travail, elle comprendrait totalement.

Les deux jeunes femmes étaient en train de discuter, comme elles le faisaient autrefois, avant qu’Amaya ne prenne la fuite. La sorcière avait souvent repensé à ces moments passés en compagnie de Jemima, mais jamais elle ne s’était dit qu’elle allait pouvoir être de nouveau devant elle à parler comme autrefois. Amaya était persuadée de ne pas le mériter. Elle était certaine, avant de venir ici, que Jem allait lui en vouloir, n’allait pas vouloir la revoir, elle pensait qu’elle avait tiré un tait définitif sur leur amitié. Pourtant non, elle était toujours là, comme si rien ne s’était jamais passé. Tout cela faisait un bien fou à la brune, savoir qu’elle pouvait compter sur ses amis. Jemima et Judith étaient les deux seules à l’aider, à la comprendre, à la soutenir même. Amaya n’était pas stupide, elle connaissait d’avance la réaction de sa sœur, de ses frères, de ses parents et du reste de ses proches. Tous étaient si égoïstes, personne ne cherchaient à la comprendre, à comprendre sa perte, sa douleur, tous trop concentraient sur leur propre personne. Pourtant, Amaya cherchait à les excuser, se rejetant sans cesse la faute, même si en réalité, elle n’était pas la seule fautive. Si sa famille avait été là depuis le début, si elle l’avait aidé dès le début, la sorcière n’en serait peut-être pas là aujourd’hui.

Écouter Jemima parler était aussi plaisant que douloureux. Amaya était contente de pouvoir discuter avec son amie, comme autrefois, mais voir à quel point elle était forte mentalement, à quel point elle était capable de tenir tête à sa famille, ça, c’était douloureux. Si autrefois Amaya était une femme forte, prête à tout pour aller loin, pour faire ce qu’elle aimait, pour protéger les siens. Depuis la perte de sa sœur, elle n’était plus elle-même. Elle était faible, elle avait perdu toute la force qu’elle pouvait avoir autrefois, elle n’arrivait plus à tenir tête à sa famille et surtout, elle ne savait même plus qui elle était réellement.

Amaya avait envie de rattraper le temps perdu, elle avait envie de tout savoir de son amie. Elle avait besoin de se changer l’esprit en se concentrant sur autre chose que ses pensées. « Je n’en doute pas. » En effet, Amaya connaissait Jem depuis de nombreuses années, depuis leur plus jeune âge pour être exact. Alors la sorcière pouvait confirmer les dires de la blonde, ce métier était fait pour elle, elle devait l’aimer sans aucun doute. Elle avait toutes les capacités, toutes les envies requises pour ce métier. Amaya aurait pu faire un métier comme celui-là, autrefois, elle aimait sauver les innocents, elle aimait se lancer à la poursuite des démons, venir en aide aux autres… Travailler dans la police était donc un choix de métier logique, mais la brune avait fait un métier s’opposant totalement à son rôle de sorcière. Elle avait besoin de faire cette coupure, besoin de faire un métier bien distinct, même si quelques années plus tôt, elle aurait totalement pu se lancer à la poursuite des démons pendant de longues heures sans se lasser, parce qu’autrefois, elle adorait ça. Mais la brune avait décidé de travailler dans la photo. En partant vivre à Londres, elle avait d’ailleurs trouvé une bonne place, grâce à ses capacités de photographe, mais au final, même pour ça elle n’était plus certaine de rien.

« C’est une très bonne idée Jem. » Quitter ce lieu lugubre, pour se retrouver dans un endroit un peu plus verdoyant et agréable, ça ne pouvait pas faire de mal, bien au contraire. Il y avait bien longtemps qu’Amaya n’était pas allée là-bas. La dernière fois qu’elle y était allée, c’était avant son accident de voiture, elle n’y était jamais retournée depuis. Retrouver des lieux familiers, où elle se sentait bien autrefois allait sans doute lui faire plaisir, lui faire du bien même. Bien évidemment, cela n’allait pas la guérir de son mal, mais ça allait l’apaiser, lui faire du bien, l’espace d’un instant. « Tu travailles trop, ça ne m’étonne pas de toi ça. » Amaya laissa échapper un sourire naturel, son ami avait toujours tout donné pour son travail et ça ne semblait pas avoir changé. « Je te suis. » Amaya n’avait pas envie d’attendre seule ici, elle ne se sentait étrangement pas rassurée. Pourtant, elle était dans un commissariat et elle possédait des pouvoirs magiques, il n’y avait aucun danger, mais malgré ça, elle ne se sentait pas en sécurité seule ici. Et puis Jem lui avait demandé si elle voulait voir, ce qui voulait bien dire qu’elle pouvait la suivre si elle voulait. Amaya avait hâte de se retrouver dans le parc, prêt du lac, à essayer de vivre un moment normal, en compagnie d’une amie, espérant laisser ses problèmes, sa souffrance loin d’elle juste un instant.

Amaya était heureuse de retrouver son amie. Elle n’avait pas parlé avec quelqu’un de cette façon depuis qu’elle avait quitté la ville. Elle savait que Jem n’était pas là pour la juger, elle était plutôt là pour l’aider et la conseiller quand elle en avait besoin. Elles étaient toutes les deux devant le commissariat, ce n’était sans doute pas le meilleur endroit pour discuter de quoi que ce soit. Il y avait forcément des oreilles partout. La conversation pouvait vite dériver sur la magie, sur la perte de la jumelle d’Amaya, sur le fait qu’elle avait penchée vers le mal avant de fuir. La magie devait rester secrète, mais quand deux sorcières parlaient ensembles, ça tournait souvent sur le sujet interdit.

Jemima avait proposé à son amie de quitter les lieux, elle avait plutôt envie d’aller au parc qui ne se trouvait pas très loin d’ici. Un endroit bien plus agréable et où peu de gens pouvait les entendre, surtout si elles allaient dans un endroit isolé. Après quelques minutes d’attente, Jem était revenu avec l’accord de son patron. Elle pouvait prendre le reste de sa journée si elle voulait. Amaya souriait légèrement en écoutant son amie, sa phrase l’avait fait sourire et en plus de cela, Ama était contente de pouvoir partager un moment avec son amie. « Tu es géniale, ils ont besoin de toi et pour que tu restes toujours aussi efficace, tu dois te reposer. C’est sans doute ce que voulait dire ton patron quand il t’a dit que tu pouvais revenir que demain et qu’il semblait y tenir. » Ama souriait à son amie, même si elle disait cela pour amuser son amie, elle était sincère.

Toutes les deux s’étaient dirigées vers la sortie, direction le parc, mais avant d’y arriver, les deux femmes s’étaient arrêtées prendre une pâtisserie et une boisson chaude. En regardant autour d’elle, Amaya n’avait pas l’impression de ne pas avoir mis les pieds ici depuis plus de deux ans. Jem s’était dirigée vers un coin calme, à l’abri des oreilles indiscrètes. « Oui, nous sommes tranquilles ici. » Jemima avait raison, les animaux n'allaient dire quoi que ce soit par rapport à leurs conversations. Amaya s’était rapidement installée sur l’herbe, à côté de son amie.

Après deux petites heures à discuter de tout et de rien, les deux jeunes femmes s’était séparée. Amaya était rentrée chez Judith, contente d’avoir retrouvée son amie et d’avoir pu discuter comme elles le faisaient autrefois.