Je suis tellement contente de te retrouver ⚝ Julian

Depuis quelques jours Amaya était de retour à San Francisco. Elle n’avait qu’une hâte retrouver ses parents et son grand frère. Moins pressée de retrouver sa sœur et son second frère qu’elle n’avait pas quitté en bon terme. Pourtant, en posant pied à terre, elle ne savait plus. Elle n’était plus certaine de ce qu’elle était en train de faire. Stressée de retrouver les siens, elle n’avait soudainement plus hâte de les retrouver. Elle avait peur de leur réaction, sans doute peur de voir qu’elle ne leur avait pas tant manqué. Elle avait pourtant souvent était en contact avec Julian, l’avait vu quelques fois depuis son départ. Mais deux longues années sans être proche des siens était long. Si tous ses proches l’avaient oublié ? C’était ridicule sans doute, pourtant Amaya avait ce genre de crainte. C’est pourquoi très tard dans la soirée, elle avait débarqué chez Judith, plutôt que chez ses parents ou chez Julian. Et depuis son arrivée, elle n’avait pas donnée une seule nouvelle, pour tout dire, elle n’était même pas encore sortie de chez son amie par peur de croiser l’un de ses proches ou une personne trop bavarde qui irait, sans hésiter, annoncer à la famille d’Amaya son grand retour. Judith lui avait dit à plusieurs reprises d’aller les voir ou du moins de les prévenir qu’elle était ici, pourtant jamais elle n’y était arrivée.

Après une nuit très agitée, Amaya s’était enfin décidée. Elle devait aller voir sa famille. Elle ne pouvait pas être rentrée pour finalement ne pas les revoir, pour finalement rester enfermée chez son amie. Surtout que cette situation lui donnée envie de reprendre le large. Elle allait commencer par aller voir Julian qui lui manquait terriblement. Elle savait qu’avec lui tout irait pour le mieux. Elle l’espérait tout du moins. Même s’il était au courant du retour d’Amaya, il ne savait pas qu’elle était bien arrivée. Après tout Ama lui avait dit qu’elle rentrerait à San Francisco ce mois-ci, mais elle ne lui avait pas encore dit qu’elle était déjà là. Amaya avait envie que tout redevienne comme avant, que tout le monde lui pardonne et qu’enfin elle pourrait retrouver sa place dans la famille. Elle était, en effet, certaine de l’avoir perdue le jour de l’accident et encore plus le jour de son départ.

Amaya n’arrêtait pas de jeter un coup d’œil à sa montre, comme si le temps allait avancer plus vite. Elle était pressée de revoir son frère, bien que très angoissée. Ce n’était plus le moment de faire marche arrière. Elle devait y aller, maintenant, elle ne devait plus attendre. Dans un élan de courage, elle avait attrapé ses clés de voiture et était allée en direction de la maison de son frère. Il ne restait plus qu’à espérait qu’il y soit bien et que sa fille elle ne soit pas là. Elle ne se sentait pas encore prête à la revoir pour l’instant. Sans même s’en rendre compte, elle était là, figée devant la porte d’entrée de son frère, la main hésitante, elle avait sonné, il ne restait plus qu’à attendre qu’il vienne lui ouvrir.

Une porte qui claque. Le bruit des clés que l'on jette négligemment dans le bol de l'entrée. Le pas lourd d'une nuit éreintante qui le mène jusque dans le canapé du salon où il se laisse tomber sans même se changer ; avec sa fille chez ses parents et le calme qui en résulte, Julian pourrait s'endormir si ce n'était pour la lumière du jour qui inonde la pièce. Et l'idée pèse sur ses paupières tandis qu'il jette un bras sur ses yeux pour feindre la nuit tombée. L'esprit presque trompé flirte un temps avec les songes et la tranquillité n'est plus troublé que par une respiration régulière.

Mais la quiétude reste éphémère puisqu'on sonne à la porte quelques vingt minutes plus tard ; la conscience peine à émerger et le corps s'extirpe non sans mal pour répondre à l'appel. La visite est surprenante puisqu'il ne s'imagine pas la personne de l'autre côté : les membres de sa famille ne s'embêtent plus à sonner depuis bien longtemps, préférant tester la poignée et entrer si celle-ci leur laisse l'accès. Il n'attend aucun colis et Prim, elle, l'aurait fait livré directement au magasin de ses grands-parents pour être certaine que quelqu'un puisse le réceptionner. Non, vraiment, il ne se l'imagine pas. Et l'hésitation qu'il perçoit émanant de cette personne ne l'aide pas non plus à définir la raison de la visite. Alors, plutôt que de tergiverser inutilement, il ouvre la porte. Sur le seuil, une silhouette solitaire avec, pour seul bagage, le fantôme de son double disparu se dévoile.  

- Ama. Il invoque son nom, l'ancre dans l'instant présent, la rend réelle. Le nom flotte dans l'air, porteur d'une joie qu'il contient difficilement à la vue de sa petite sœur. Il se rappelle néanmoins l'hésitation et s'avance vers elle pour l'envelopper de sa douceur, espérant apaiser au moins un instant les tourments de son âme et lui assurer son amour inconditionnel ; une promesse qu'il scelle d'un baiser sur la tempe. Tu m'as tellement manqué. Il ne l'a pas jugé autrefois, alors qu'elle s'était envolé loin d'eux et il ne commencera pas aujourd'hui. Mais il ne peut nier que son absence lui pèse parfois, avec l'impression d'avoir perdu deux sœurs au lieu d'une secouant le plus profond de son être lors des mauvais jours. Il a d'ailleurs du mal à se résoudre à la lâcher pour qu'ils aient une conversation qui ne sera pas étouffée par l'étreinte.

Amaya était sur le point de revoir son frère, il était à quelques mètres d’elle. Pourtant, si près du but, elle hésitait. Devait-elle réellement sonner ? Devait-elle réellement retrouver sa famille ? N’était-ce pas mieux pour elle de faire demi-tour, de sauter dans le premier avion en direction de Londres, retourner dans ce qui lui servait de chez elle depuis deux longues années ? Elle connaissait Julian, elle savait comment il allait l’accueillir, elle savait qu’il tenait à elle et elle tenait à lui. Pourtant, elle était envahie par la peur, une peur ridicule, mais elle craignait d’être rejetée par les siens. Si personne ne lui avait pardonné tout le mal qu’elle leur avait fait, elle ne le supporterait pas. Sans réellement s’en rendre compte elle avait sonné, un peu hésitante, mais elle ne pouvait plus faire marche arrière. Le cours laps de temps entre le moment où elle avait sonné et le moment où la poignée avait bougé lui avait semblé être une éternité. En s’ouvrant, la porte avait laissé paraître le visage de Julian. Amaya n’avait pas su comment régir, elle n’entendait que son nom prononcé par son frère. Tout cela lui semblait tellement faux. Elle s’était tellement de fois imaginé cette scène. C’est seulement quand son frère l’avait prise dans les bras qu’elle s’était rendue compte que tout cela était vrai. Son frère se trouvait réellement là, il était bien en train de la serrer dans ses bras. Amaya profitait de chaque seconde de cet instant. « Toi aussi tu m’as manqué Julian. » Amaya ne pouvait pas retenir ses émotions. Elle avait le cœur qui battait vite, la voix tremblante et les yeux larmoyants. « Juilian… Je… Je suis tellement désolée. » Ces paroles étaient sincères. Elle regrettait tellement de choses. Elle s’en voulait d’avoir fait souffrir ceux qu’elle aimait. Elle savait que la mort d’Anaya avait été une grande perte pour toute la famille et son départ n’avait pas arrangeait les choses. Le peu de nouvelles qu’elle donnait non plus. Tous les événements qui avaient son départ, elle s’en voulait pour toutes ces choses. Ama n’espérait qu’une chose : que tous lui pardonne ses erreurs. Si Amaya pouvait revenir en arrière, si elle pouvait tout changer, elle l’aurait fait, sans aucune hésitation. Si elle avait pu effacer la souffrance de sa famille, elle l’aurait fait, mais elle n’y pouvait rien, elle n’avait pas ce pouvoir là. À la place de cela, elle se faisait souffrir elle-même depuis deux ans. Comme si tout cela allait apaiser la peine de sa famille.