Home Sweet Home - Jemima

Jemima & Oxana
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La matinée avait été surréaliste. Inespérée même. Oxana n'osait pas y croire tellement elle redoutait que tout ça ne soit qu'une ruse ou même un test. Elle était persuadée qu'elle allait finir par se retrouver à nouveau dans sa ferme et qu'on allait la rouer de coups pour avoir osé partir avec une inconnue. Cette femme était arrivée comme le messie venu la délivrer de ses tortionnaires. Dans le feu de l'action, Oxana avait sauté sur l'occasion. Ça faisait bien trop longtemps qu'elle rêvait d'échapper à cette vie d'enfer pour refuser une main tendue. Mais maintenant qu'elle y réfléchissait, plus ça allait plus elle se demandait si elle n'avait pas eu tort. Ils allaient la retrouver, c'était sûr. Peut-être même que cette Jemima était leur complice et qu'elle la ramenait tout bonnement à la ferme. Oxana n'avait pas dit un mot de tout le trajet. Elle se préparait déjà au pire. Finalement, la voiture s'arrêta devant une maison et l'espoir revint dans l'esprit de l'adolescente. Elle devait sûrement rêver. Elle mit un pied mal assuré en dehors du véhicule puis un deuxième. Prenant une grande inspiration, elle finit par suivre la jeune femme à l'intérieur, tous ses sens en alerte. Bien qu'elle ait de nouveau l'espoir que tout ça soit vrai, elle ne parvenait pas à se détendre complètement.

Quand la porte se referma derrière elle et qu'elle put observer ce qui serait désormais son nouvel environnement, rien de tout ce qu'elle voyait ne l'aida à se rassurer. Il y avait plein d'objets étranges qu'elle n'avait jamais vu. Tout ça servait-il à l'usage de la sorcellerie ? Très probablement. Oxana hésitait entre la curiosité d'aller voir ce que ça pouvait être et la crainte de toucher à ce qu'il ne fallait pas. Aussi, resta-t-elle dans un coin de l'entrée sans bouger. Du moins jusqu'à ce qu'un de ces objets (un téléphone fixe) se mette à produire un bruit strident qui lui arracha un cri de terreur et la fit sursauter. C'était une alarme. Ils allaient la retrouver c'était sûr. Cette idée la fit sortir de sa torpeur et sans y réfléchir plus que ça, Oxana donna un grand coup dans le petit objet qui vola de son socle et alla s'écraser en morceaux sur le sol. Toutefois, la base sur lequel s'était trouvé cette chose émettait toujours ce bruit. L'adolescente ouvrit de grands yeux terrifiés, attrapa le petit rectangle et le frappa sur le coin d'un meuble jusqu'à ce qu'il cesse. (Elle avait arraché le fil de la prise). Toute tremblante, elle jeta également la base sur le sol et se tourna d'un air affolé vers Jemima « Ils m'ont retrouvée ! Il ne faut pas rester là. » Ni une ni deux, la jeune fille s'élança vers la porte et se mit à courir vers la route, manquant de peu de se faire renverser par une voiture qui klaxonna à plusieurs reprises, la faisant encore plus paniquer.

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@Oxana Siede & @Jemima Rojas 

Si j'avais pu imaginer ce matin à quel point les choses allaient changer, je ne l'aurais pas cru. J'avais pourtant su que la mission à laquelle j'allais participer serait importante. J'en avais eu la prémonition. Mais pas à ce point. C'était une mission de sauvetage. J'avais réussi à faire en sorte d'en faire partie, alors même que j'étais dans mes dernières heures dans la police. Car j'avais décidé de quitter mon métier. Pas forcément définitivement, mais le temps au moins de maîtriser un minimum mes nouvelles aptitudes. Et j'avais eu de la chance que cette mission ait eu lieu maintenant, alors qu'il ne me restait que quelques jours à faire. Ma prémonition m'ayant montré que celle à sauver était une sorcière, je ne pouvais pas laisser mes collègues s'en charger sans que je sois présente. Cela aurait été trop risqué. J'avais donc réussi à récupérer la place d'un autre collègue en demandant à Gabriel de le faire venir au tribunal pour un soi-disant témoignage de dernière minute. La mission de sauvetage avait eu lieu. Et elle avait été compliquée sur bien des points. Déjà, car des démons avaient été de la partie, mais aussi, car il avait fallu s'en occuper de manière que mes collègues humains ne voient rien, sans oublier que j'avais dû composer avec des pouvoirs instables et que la victime était terrifiée. Mais désormais l'adolescente était sauve.
Gabriel avait utilisé ses contacts et son métier de procureur pour obtenir rapidement que nous puissions l'accueillir. Les papiers de famille d'accueil officielle seraient sans doute plus longs à obtenir, mais en attendant la jeune fille serait sous notre tutelle et elle pourrait venir chez nous. C'était une bonne chose, car une sorcière aussi terrifiée et fragilisée, qui avait subi ce qu'elle avait vécu, elle n'aurait pas supporté un foyer d'accueil.
Nous étions arrivés à la maison et avec un sourire qui se voulait rassurant, je montrais à l'adolescente le foyer où elle pourrait se reposer et se reconstruire. Je la laissais donc prendre le temps de sortir du véhicule, puis je la laissais poser son regard un peu partout, le temps d'aller ouvrir la porte. Puis j'entrais, laissant la porte grande ouverte. Je ne voulais pas la forcer à rentrer trop vite. Elle avait été captive, aussi si j'étais trop brusque, je risquais de renforcer son sentiment d'insécurité. Oxana entra enfin et je lui laissais un temps, avant de refermer la porte délicatement, sans gestes brusques. Je lui laissais de l'espace, tout en la regardant observer l'intérieur. Elle risquait de prendre un temps avant d'arriver à trouver ses marques. Le téléphone fixe sonna et le bruit strident de l'appareil fit naître une terreur dans le cœur de la jeune fille fragile.

- Non ce n'est...

Je n'eus même pas le temps de terminer que je voyais déjà l'adolescente terrifiée sortir en courant. Instinctivement, je la suivais, la sachant apeurée. Je pouvais ressentir sa crainte comme si c'était la mienne. Les joies de l'empathie… mais cette fois ci, je pouvais la comprendre d'autant mieux. Sortant de la maison, je la vis s'élancer vers la route. Je courrais vers elle, faisant des grands signes aux véhicules pour qu'ils ralentissent à défaut de s'arrêter. Dès lors, je ne ressentais plus uniquement la peur d'Oxana, mais également la mienne face au danger que la situation représentait. Je dus même user de ma télékinésie pour faire discrètement tourner un volant et faire dévier le conducteur, évitant ainsi un drame. Mais les klaxons se faisaient retentir, à la fois pour nous signaler le danger de la scène, mais sans doute aussi agacés de voir une femme et une adolescente en plein milieu de la route. J'arrivais enfin à hauteur d'Oxana et fut soulagée de voir qu'elle était indemne. Du moins physiquement, car émotionnellement, je ressentais que cela était un chaos.

- Hey, regarde-moi.

Je m'adressais à elle comme avec une enfant même si physiquement elle en était à la fois une et plus vraiment. Mais au vu de son vécu, il était clair qu'elle devait encore se sentir comme tel. Je parlais donc avec une voix calme et douce, l'incitant à me regarder sans faire de gestes qui pourraient paraître agressifs tant elle était terrifiée.

- Ils ne t'ont pas retrouvée, crois-moi. C'était un téléphone. Ça sert à... si tu le souhaites, je vais te montrer à quoi ça sert et comment ça fonctionne. Mais promis, ce n'est pas eux.

Il était difficile de tout lui expliquer en plein milieu d'une route. Le principal pour le moment était d'évacuer la zone dangereuse sans accentuer son sentiment de peur. Je pesais soigneusement mes mots pour qu'elle puisse comprendre et que cela amène progressivement à l'apaiser. Même si pour le moment, ce n'était pas gagné.

- On ne doit pas rester sur la route. Les voitures vont vite et c'est risqué pour ceux dans la voiture autant que pour nous. Tu veux bien revenir à la maison avec moi ?

Je ne voulais pas la forcer à rentrer si elle n'était pas prête. Mais il fallait avant tout quitter la route et s'éloigner des voitures. Je n'avais pas de problèmes à l'idée qu'elle ne rentre pas immédiatement si elle était craintive. Mais je voulais qu'elle puisse réfléchir et tenter de l'apaiser dans un endroit moins à risques.

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Jemima & Oxana
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La panique s'était tellement emparée de l'adolescente que les larmes lui montèrent aux yeux. Le souffle court et la vue trouble, elle ne s'attendait pas à se retrouver face à des voitures qui lui foncent dessus. Elle en avait déjà vu puisque les sorciers de la ferme s'en servaient pour les déplacements sur de grandes distances, mais les souvenirs associés à ces machines étaient loin d'être très agréables.

Le vacarme qu'elles produisaient amena l'adolescente à se couvrir les oreilles avec les mains. Elle mit quelques temps à se rendre compte que Jemima lui avait couru après et semblait vouloir lui dire quelque chose. Mais Oxana était bien trop focalisée sur l'idée de s'enfuir pour l'écouter. D'autant plus que Jemima l'avait aidée et qu'à cause d'elle, la jeune femme se retrouvait aussi en danger. La brunette ne voulait pas lui attirer d'ennuis. Tandis que sa bienfaitrice se rapprochait d'elle, Oxana retourna également dans sa direction pour l'avertir du danger.

Peu importe, elle le verrait sûrement par elle-même. Mais alors que l'adolescente s'attendait à ce qu'elle réagisse aux menaces qu'elles venaient de subir, elle fut surprise de voir que Jemima tentait au contraire de la rassurer. Un télé-quoi ? Il y avait des choses plus importantes que ce qu'elle tentait de lui expliquer pour le moment non ? « Plus tard ! Il ne faut pas rester là. » Les machines continuaient à produire ce son assourdissant qui lui donnait envie de leur rentrer dedans, mais elle n'était pas assez stupide pour ne pas se rendre compte que ce serait une mauvaise idée.

Oxana attrapa alors l'un des poignets de Jemima histoire de pouvoir l'entraîner avec elle dès qu'elle trouverait un moyen de s'extirper de là. Commençant à s'habituer à sa peur, la jeune sorcière essaya d'analyser la situation. Il y avait des gens à l'intérieur des voitures. Qui étaient-ils ? Des sorciers ? Des démons ?

Perdue au milieu du chaos de ses émotions et ne sachant plus à quoi se raccrocher, la voix de Jemima finit finalement par faire son petit chemin jusqu'à son cerveau. Mais qu'est-ce qu'elle racontait ? Retourner dans la maison serait le meilleur moyen de se faire attraper ou même pire. Peut-être que Jemima se ferait tuer pour l'avoir aidée. Quant à elle, elle serait très certainement punie pour s'être enfuie. A moins qu'il y ait de quoi se défendre dans la maison. « Pourquoi dans la maison ? On ne pourra plus rien faire si on se fait piéger entre quatre murs. Il faut s'en aller loin d'ici pour qu'on ne nous retrouve pas ! » La peur que ressentait Oxana était encore montée d'un cran. Elle ne parvenait plus à réfléchir et sa respiration devenait difficile. La tête commençait à lui tourner et il ne manquait plus grand chose pour que la terre se mette à bouger pour de vrai.

hrp:

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@Oxana Siede & @Jemima Rojas 

Je voulais tellement aider cette jeune fille à aller mieux. Pour elle, mais aussi pour moi, car sa panique me contaminait et je luttais pour ne pas me laisser envahir. Heureusement -ou pas- s'ajoutait à ça l'ensemble des émotions de ceux dans les voitures. Et tout ce micmac émotionnel en moi créait un trop grand chaos pour que je me laisse envahir par une seule émotion. C'était comme se faire piquer par des insectes tout en se faisant mordre par un animal et en plus recevoir un ballon en pleine poire. Séparément, ça faisait mal, mais tout en même temps, il y avait trop de douleurs simultanées pour que le cerveau arrive à trouver la source du mal et donc il envoyait juste le premier message qu'il pouvait, même si ça n'était pas cohérent avec le contexte. Et bien mon chaos empathique, c'était ça actuellement. Je ressentais juste un fort sentiment d'urgence. Et alors qu'Oxana m'avait tiré par les poignets pour fuir la maison, je fis de même pour la ramener sur le trottoir. Je lâchais aussitôt ceux ci et me reculait pour lui montrer que mon but avait été de lui éviter un danger et non pas de la capturer. Je mis d'ailleurs mes mains derrière mon dos pour confirmer que je n'allais pas l'emmener de force où que ce soit. Je repris mon souffle, laissant retomber la pression, puis li expliquait calmement.

- Ce ne sont pas des démons, Oxana. Le téléphone est une machine pour communiquer. C'est humain, pas magique.

Je tentais de lui expliquer les choses rapidement, pour ne pas lui laisser le temps d'imaginer encore plus effrayant que ce qu'elle pouvait déjà ressentir. C'était comme faire découvrir le monde moderne à quelqu'un qui venait d'une autre époque du passé. Sauf que là la personne était une jeune fille pas encore adulte et qui sortait tout juste de l'Enfer. Et vu qu'elle avait été sauvée de démons, le terme n'était pas vraiment une métaphore.

- Et la maison sera toujours l'endroit le plus sûr. Parce que c'est mon territoire. Là où il y a tout ce dont je me sers pour me défendre. Nous défendre.

Puisque nous étions désormais sur le trottoir face à la maison, le danger était évité. Plus de véhicules fonçant à toute allure. Mais si je nous savais désormais en sécurité, mon empathie me faisait entrevoir que pour la jeune Oxana, ce n'était pas le cas.

- Rentre dès que tu te sens prête, d'accord ? J'ai le pouvoir de ressentir le danger. Si un démon approche, je le sentirais avant toi...

Ma voix était douce et se voulait rassurante. Je n'allais pas la forcer à rentrer si elle était encore craintive à l'idée qu'un démon y soit. Je me contentais de faire quelques pas en marche arrière, patiente et confiante. Et alors qu'Oxana était encore dehors, je la regardais en souriant, pour lui montrer qu'elle ne risquait rien.

- J'ai promis de te protéger. Je compte bien tenir ma promesse. Et je ne suis pas la seule sorcière de ma famille. Tu n'es plus toute seule face aux démons. Tu as tous les Donovan derrière toi.

Et quand elle serait prête, je lui apprendrais comment utiliser ses pouvoirs pour se protéger. Entre autres. Mais si je ne lui en parlais pas pour le moment, c'était parce qu'elle avait déjà fort à faire pour découvrir tout un monde humain qui lui était inconnu et effrayant. Je voulais qu'elle commence par découvrir ce que ça faisait de ne plus se sentir constamment en danger. Et au vu des émotions que je pouvais capter d'elle, le chemin allait être très long. C'est pour cette raison que j'avais commencé par lui dire que je pouvais ressentir le danger et que ma famille était aussi des sorciers. Elle devait savoir qu'elle n'était plus seule. Je me doutais que ça n'allait pas la rassurer dès maintenant, mais j'étais prête à le lui répéter autant de fois qu'elle aurait besoin de l'entendre. Pour que ça fasse doucement son chemin dans son esprit. Ce n'était pas Oxana qu'il fallait apprivoiser, c'était sa peur. Oxana était encore une enfant et elle avait déjà enduré bien trop de terreurs pour son âge. Mais j'avais désormais le temps pour l'aider au quotidien. Et peut-êtr qu'apprendre à maîtriser mes nouveaux pouvoirs en même temps que l'aider à découvrir ce qui l'entourait, ça serait un mal pour un bien. Car je pourrais d'autant mieux la comprendre. Pas à pas avec elle.

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Jemima & Oxana
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Il fallut un moment à Oxana avant qu'elle se rende compte que Jemima n'était clairement pas dans le même état d'esprit qu'elle. Sur le moment, elle se dit que la jeune femme ne se rendait pas compte de la situation mais il s'avéra qu'elle essayait plutôt de la rassurer, bien que ce qu'elle était en train de lui dire la rendait plus confuse qu'autre chose. Un télé quoi ? Une machine pour communiquer ? Jemima était plus âgée que l'adolescente c'était sûr, mais Oxana n'était plus un bébé et elle n'avait jamais vu ce genre de chose auparavant. Il était peu probable que le truc qui avait fait tant de vacarme puisse être un objet humain. Oxana ne savait plus quoi penser, elle était tellement perdue qu'elle avait laissé Jemima la ramener sur le trottoir sans même s'en rendre compte.

Les automobilistes finirent par reprendre leur route, l'une d'elle les insultant gracieusement au passage. L'adolescente n'ayant pour le moment aucun contrôle sur ses émotions provoqua inconsciemment une petite secousse devant le véhicule de la bonne femme, ce qui eut pour effet de créer un trou dans le bitume, la conductrice se faisant secouer bien comme il le fallait quand l'une des roues de la voiture passa dedans. Oxana était toutefois trop perturbée pour l'avoir remarqué. Le cœur battant toujours à cent à l'heure, la jeune fille préféra s'assurer que les potentielles menaces s'éloignent, suivant des yeux le flot de voiture jusqu'à ce que la route redevienne vide. Se sentant moins en danger mais toujours à cran, elle essaya de se concentrer sur les mots de sa protectrice lui parlant de sécurité.

« Tu en es bien sûre ? On sera en sécurité ? » Tous les muscles de son corps étaient encore contractés. Elle avait envie de croire que son cauchemar était bel et bien finit mais en même temps, elle avait tellement peur de s'accrocher à un faux espoir. Rien que l'idée de retourner à la ferme lui donna envie de se mettre à pleurer. Elle repoussa tant bien que mal la boule qui se formait dans sa gorge et regarde la sorcière Donovan dans les yeux pour y trouver un peu de courage. « D'accord. On... On va rentrer. » L'assurance était loin d'être là mais au moins, elle tentait un premier pas vers une nouvelle vie.

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@Oxana Siede & @Jemima Rojas 

L'adolescente semblait autant terrifiée par l'intérieur de ma demeure que par le monde extérieur. Ses paroles le trahissaient autant que ses émotions qui venaient me frapper de plein fouet. Et je n'allais certainement pas la blâmer. Après tout ce qu'elle avait vécu, après avoir été captive de démons, elle faisait déjà preuve d'une capacité d'adaptation que beaucoup auraient été incapables d'avoir. Il était naturel qu'elle ait peur et ait autant de méfiance avant tant d nouveautés pour elle. C'était un nouveau monde qui venait de lui tomber dessus du haut de ses 15 ans. Alors quand elle me demanda si j'étais certaine que ce lieu qu'était mon foyer, était un endroit bien sécurisé, je lui répondis aussitôt par l'affirmative.

- Cette maison est avec celle de mes parents ou celles de mes frères, est l'un des endroits les plus sécurisés.

Ce n'était pas de l'arrogance, mais nous autres sorciers Donovan, nous avions suffisamment fait face aux attaques de démons pour avoir appris comment éviter que nos foyers soient le terrain de tout affrontement. Combats démoniaques, s'entend. Parce que les combats que j'avais pu avoir plus jeunes avec mes aînés chez nos parents, pour savoir qui aurait la dernière gaufre lors du petit déjeuner, ça pouvait parfois être violent. Et plus d'une fois, c'était ma sœur, pourtant sans pouvoirs, qui gagnait à l'issue du "match". Ne pariez jamais d'office contre Judith quand il s'agissait de nourriture. Rares sont les magies pouvant faire le poids face à sa gourmandise.
Mais aujourd'hui, Oxana n'avait pas besoin de mes souvenirs d'enfance pour la rassurer. Elle avait besoin de franchise et de sécurité. Et je ne mentais pas en lui disant qu'en vivant dans la maison d'une sorcière Donovan, une maison qui était mon sanctuaire magique, elle serait en lieu sûr.

- Oxana, je ne te forcerais pas à y entrer, si tu ne t'en sens pas prête.

Je lui avais dit ça d'une voix douce et qui se voulait rassurante. L'adolescence avait certes dit d'accord pour entrer, mais mon empathie me trahissait son appréhension encore présente. Et maintenant qu'Oxana allait vivre ici avec nous, il était important qu'elle puisse arriver à voir cette maison comme son foyer, le refuge où elle pourrait enfin avoir la sensation de sécurité qu'elle n'avait sans doute jamais eu. Je ne voulais pas qu'elle franchisse le seuil, juste parce qu'il fallait entrer, mais qu'elle le fasse parce qu'elle se sentait vraiment prête pour. Parce qu'elle en aurait véritablement envie. Alors pour lui montrer qu'il n'y avait pas d'obligation à ce qu'elle le fasse maintenant si c'était trop rapide pour elle, je sortis de nouveau de la maison et m'adossais au mur extérieur en lui offrant un regard bienveillant.

- Tu peux rester sur le seuil de la maison aussi longtemps que tu le souhaites, si tu préfères te laisser le temps d'observer l'intérieur de la maison, de dehors, tu peux. Et je resterais ici, à tes côtés pour te protéger en attendant que tu te sentes vraiment prête.

La jeune fille n'était peut-être pas habituée à ce qu'on prenne en compte ses besoins, mais en venant habiter ici, c'était aussi quelque chose de nouveau qu'elle risquait de découvrir. Elle était importante et il y avait désormais des personnes qui tenaient à elle et qui s'assureraient qu'elle soit en sécurité physiquement, mais aussi émotionnellement.

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Jemima & Oxana
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Tout ça était surréaliste. Oxana ne savait pas si elle devait croire ce que lui disait Jemima. Peut-être que c'était vrai après tout. Peut-être qu'elle aurait enfin un endroit sûr où elle serait vraiment en sécurité. Elle avait peur d'être trop naïve mais en même temps, elle voulait aussi se laisser la possibilité d'avancer. Heureusement, le fait que sa sauveuse lui laisse le choix lui donna envie de la croire. Elle tenta de calmer sa respiration beaucoup trop saccadée à cause de son appréhension et aussi ses battements de cœur. Ce dernier n'allait pas tarder à s'échapper de sa poitrine si ça continuait. Alors, timidement, l'adolescente plongea son regard dans celui de Jemima et y trouva le courage de faire le premier pas. « Non, c'est bon. Je... Je vais venir, tout va bien. » La brunette se répéta ces trois derniers mots en boucle dans sa tête et finit par franchir le seuil. Elle se crispa un peu plus, s'attendant à ce que quelque chose se produise mais il ne se passa absolument rien. Voilà, tout allait bien. Elle resta un moment sans bouger, jetant un coup d'oeil méfiant au pauvre téléphone toujours sur le sol puis ses yeux se posèrent finalement sur Jemima.

Étrangement, sa présence la rassurait et pour se donner encore plus de courage, l'adolescente lui prit la main comme aurait put le faire une petite fille avec sa mère. « Alors... C'est vraiment ici que tu vis ? »

Désormais plus calme, Oxana se mit à observer autour d'elle avec un regard neuf. Tout était vraiment trop propre ici. Comment faisait-elle pour que son intérieur soit aussi immaculé ? Et l'odeur... Il n'y avait pas d'odeur ou presque. Difficile de croire qu'elle était dans un endroit clos. Il n'y avait pas la moindre trace sur les murs ni même de traces de combat. C'était vrai alors ? Cet endroit était vraiment sûr ? « Je... J'aurais le droit d'aller partout ? » Oui, il y avait certainement un endroit où elle cachait des trucs. Il y avait sûrement des règles à respecter et elle aurait tout un tas de choses à découvrir. Et puis de là où elle était, elle n'avait pas encore vu d'animaux. Ils devaient bien vivre quelque part pour que la sorcière puisse se nourrir. Oxana aurait presque envie d'aller s'en occuper pour retrouver quelque chose qui ne lui était pas complètement inconnu. « Et... Ce sera quoi mon travail ? » Cette dernière question fit remonter ses craintes. Peut-être allait-elle l'exploiter elle aussi. Elle quittait peut-être des démons pour être asservie par quelqu'un d'autre.

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@Oxana Siede & @Jemima Rojas 

Oxana avait fini par rentrer, même si je ressentais que ça avait été fait avec inquiétude.

- Oui. Avec mon mari Gabriel. Tu te souviens de lui ? Pour le moment, il est en formation ailleurs.

Je lui montrais du doigt notre photo de mariage pour lui rappeler à quoi il ressemblait. Elle l'avait déjà vu une fois puisqu'il était celui qui avait le nécessaire administratif pour qu'elle puisse vivre avec nous. Mais il était actuellement en formation et c'était bien tombé, car ça me permettait d'acclimater Oxana en douceur, juste elle et moi pour le moment et de l'aider à être davantage à l'aise. Mais je devais aussi la préparer à ce que Gabriel soit aussi dans son environnement plus tard en limitant le plus possible le risque que ça génère chez elle de l'inquiétude.

- Et c'est désormais aussi chez toi.

Il était important qu'elle l'entende. Elle n'était pas chez Gabriel et moi. Elle était chez elle aussi. Elle était incluse dans le "chez nous".
Je la laissais prendre le temps d'observer autour d'elle. De s'imprégner du lieu pour qu'elle puisse ultérieurement de l'approprier. Il était clair que ça serait progressif et qu'il lui faudrait du temps. Elle allait devoir apprivoiser un nouveau monde qui était pourtant celui d'où elle venait. Aussi, je la laissais pendre le temps de regarder, analyser... Je la laissais également être celle qui brisait le silence avec une question.

- Bien sûr. Ici, si une porte est verrouillée, ce sera uniquement la salle de bains et ce sera pour indiquer qu'elle est occupée le temps de s'en servir. Mais ça ne voudra pas dire que tu n'as pas le droit d'y aller ensuite. Juste que c'est occupé, le temps de se laver ou d'aller aux toilettes. Mais tu verras, toutes les autres portes ne sont pas verrouillées et en général, toujours grandes ouvertes. Quelque soit l'endroit où tu veux te rendre, tu es libre d'y accéder.

Heureusement, Gabriel et moi étions d'un naturel à tout laisser grand ouvert à l'intérieur. Pour continuer à communiquer d'une pièce à l'autre. Je n'aurais jamais songé jusqu'à présent que cette habitude anodine pour nous, pourrait peut-être aider à rassurer Oxana.

- Tu n'auras aucun travail. Quand tu seras prête et que tu le désireras, je commencerais à te donner des cours. Pour apprendre à t'adapter à tout ça, mais aussi te mettre à jour si tu souhaites faire des études. Et aussi t'apprendre à contrôler tes pouvoirs et ta nature pour que tu puisses te défendre et te sentir à l'aise avec qui et ce que tu es. Mais ça se fera progressivement, quand tu le souhaiteras. Ce sera à toi de décider et de me dire quand. Toi et uniquement toi.

J'avais volontairement répété plusieurs fois et d'une voix qui se voulait rassurante que ce serait quand elle serait prête. Avec mon empathie, je ressentais son angoisse et son appréhension et il était important pour moi qu'elle sache que désormais, elle étai celle qui aurait le contrôle de sa vie. Je serais là pour l'aider, la protéger et même la guider si elle avait besoin. Mais elle serait la maitresse de son existence. Ses choix et ses décisions auraient de l'importance et seraient respectés.

- Quelle pièce tu souhaites voir en premier ? Ta chambre ?

Tel un chaton perdu dans un nouvel environnement, je la laissais s'habituer au lieu, pièce par pièce.

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